Pouvoir et négligence
Il faut croire que l'aventure et la passion pour le fleuve se sont étiolées avec l'arrivée des nouveaux contrats en 1914: plus question de licence exclusive pour 20 ans, et des conditions bien plus serrées ont cadré les activités des Messageries en tant que service public1). Entre les crues et les courants du Mékong, le manque de diligence des administrateurs en charge et des infrastructures insuffisantes, Les Messageries ont continué à négliger leurs clients jusqu'à ce que l'outrage éclate à la fin des années 20.
Le Temps de l'Aventure
Les Messageries Fluviales ont pris un rôle central dans la logistique des expéditions de 1893 vers l'amont, avec des chaloupes comme la Hàm Luông, le Lagrandière ou le Massie, qui permirent d'ouvrir la voie du Mékong jusqu'à Luang Prabang voire au Triangle d'Or et aux confins les plus au Sud de la Chine. À l'époque comme aujourd'hui, les chutes de Khône, aux 4000 îles, interdisaient de franchir le Mékong du Cambodge au Laos. Les Messageries installèrent sur la grande île de Khône d'abord une voie métrique avec trois wagonnets tirés à bras, et qui permirent de transporter les premières chaloupes, puis un vrai chemin de fer quand le traffic commercial s'installa.
Des origines controversées
L'histoire des Messageries remonte aux années 1870, période où l'amirauté entretenait une troupe de l'ordre de trois mille hommes en Cochinchine et où le port de Saïgon, à l'époque un peu plus de cinquante mille âmes, abritait le Conseil Colonial. Celui-ci, avant Doumer, gérait l'impôt levé sur la population locale de façon discrétionnaire. Autant dire qu'il devait falloir un vrai esprit d'aventure et une poigne solide ou un brevet de natation en eaux troubles pour monter une affaire à l'époque.