Chaque année maintenant, la rivière entre à Cần Thơ deux fois par jour pendant quelques jours dans les semaines qui suivent l'équinoxe.
Avec leur cohorte de drames et le coût qu'elles font porter à la société, les inondations sont peut-être juste un signe de l'histoire en devenir: elles sont provoquées par de nombreux facteurs, certains globaux et inaccessibles, d'autres où nous pouvons agir. Mais pouvons-nous vraiment?
Les inondations en général ne sont pas nécessairement mauvaises, en particulier les inondations saisonnières d'une rivière. Elles apportent des alluvions de l'amont, et les déposent en nouvelles strates sur le sol, et les jours de hautes eaux apportent habituellement à la terre du delta un renouveau de capacité à porter la vie. En fait, sans inondations, il n'y aurait pas de delta du Mékong. Et pourtant, les inondations portent un coût en dommages, en santé publique, et même en vies humaines.
Les inondations d'Octobre sont prévisibles: Juste après l'équinoxe d'automne, les marées en haute mer sont les plus hautes de l'année, et le Mékong aussi est très haut, comme il apporte l'eau de la font des neiges de l'Himalaya et les eaux de pluie de la mousson d'Asie su Sud-Est. Comme les courants de marée rencontrent le flot du Mékong, la poussée des eaux envahit une grande part du delta. Mais les inondations ont été de plus en plus extensives ces dernières décennies.
Ce qui change dans le delta du Mékong vient du climat, du Mékong, et de l'usage que nous faisons du sol et de l'eau souterraine dans le delta lui-même.
Dans les villes, la population n'a eu de cesse de relever le sol, en construisant plus hauts non seulement les niveaux des maisons, mais aussi les rues et les trottoirs, pour se maintenir les pieds au sec. Ça peut être efficace face aux hautes eaux de la rivière quand les marées sont trop courtes pour que la rivière ne déborde réellement, mais quand elle le fait, ou simplement quand arrivent les pluies de mousson, on ne peut pas grand-chose face aux volumes d'eau en jeu.
Pire, le revêtement des rues et des trottoirs en lui-même, pour utile qu'il soit pour des raisons sanitaires par temps sec, empêche l'eau de s'échapper dans le sous-sol et les nappes souterraines.
Les égouts enterrés eux-mêmes jouent un rôle: non seulement ils limitent l'évacuation des eaux d'inondation, mais ils offrent un passage pour les hautes eaux de la rivière vers la terre, au-travers des terrains plus élevés, des routes, et même de digues. En fait, sous la poussée de la rivière, les égouts se déverser en ville et des eaux noires vont apparaître par endroit –pas très sain, même si la majorité des maisons a une fosse septique et que l'essentiel des eaux noires est moins dangereuse qu'elle n'en a l'air.
Et puis il y a aussi des inondations à la campagne,
et puis l'érosion du sol et des berges,
et l'approche du manque d'eau douce dans le delta.
Les inondations d'automne ne porteraient pas tant de drame si elles n'étaient pas le signe annonciateur d'une évolution plus profonde. Parlons de l'épuisement des nappes phréatiques, et parlons de la qualité de l'eau du Mékong. Plus à ce propos bientôt.